Retour du Pérou

Retour du Pérou

09 juillet | 2014

Gaël Marteau, Directeur Oikocredit en France, a visité un collectif de planteurs de bananes bio et équitable financé par Oikocredit au Pérou. Retour sur une rencontre édifiante quant aux impacts conjugués du commerce équitable et de la finance solidaire.

Depuis Piura, capitale régionale au nord du Pérou, où se tenait cette année en juin l’Assemblée générale de la coopérative Oikocredit, il faut rouler environ une heure pour atteindre les terres cultivées par l’Association de Petits Producteurs de Banane Organique de Saman (APPBOSA).

Premier constat : l’eau, première nécessité et allié précieux


La luxuriance de la végétation à cet endroit précis a quelque chose d’improbable, tant la région alentour apparaît pelée, signe d’un climat semi-désertique affectant toute la bande côtière. Renseignement pris, c’est une eau d’irrigation arrivant en partie par gravitation de l’Equateur voisin qui permet à une telle activité agricole de se développer dans cette zone géographique. Les  paysans d’APPBOSA nous confient que leur prochain défi sera le creusement de puits pour stabiliser leur approvisionnement en eau, et compenser des pluies devenues moins abondantes ces dernières saison.

Deuxième constat : la force du collectif


Autrefois possédées par quelques grandes familles, les terres d’APPBOSA ont été nationalisées, puis partiellement délaissées pendant un certain nombre d’années. De petits paysans s’y sont installés et se sont progressivement spécialisés dans la plantation de bananes. Le regroupement d’une centaine d’entre eux a donné naissance en 2003 à l’APPBOSA, avec pour objectif premier une meilleure mise en marché de leur production. Aujourd’hui l’association regroupe 350 exploitants, et forts du principe selon lequel possession vaut titre, les socios d’APPBOSA entendent bien cultiver durablement les terres qu’ils sont parvenus à valoriser. L’an dernier l’APPBOSA a été distinguée au Pérou comme organisation paysanne exemplaire pour sa croissance durable et sa bonne gestion. Son prochain objectif serait de devenir une coopérative à partir entière.

Troisième constat : le commerce équitable change la donne


Quelques années après la création de l’Association, les paysans d’APPBOSA se sont engagés dans une double démarche de certification et de vente directe à l’export. Aujourd’hui 100% de la banane produite par APPBOSA – de variété Cavendish Valery - est certifiée bio et équitable. Elle est exportée directement par l’Association vers les marchés d’Amérique du nord et d’Europe (Pays-Bas, Allemagne, Belgique, et peut-être à l’avenir la  France ?). Résultat de la production certifiée et de la suppression des intermédiaires : le prix payé aux producteurs d’APPBOSA est passé de 3 à 7 $ la boîte. Ils nous le disent : cet accroissement de leur revenu productif s’est traduit par une réelle amélioration des conditions de vie pour eux et leurs familles.


Quatrième constat : la finance solidaire est un catalyseur

Après une entrée en relation remontant à l’année 2007, Oikocredit a accompagné l’APPBOSA dans son développement, par le déblocage d’un premier permettant d’investir dans un système de câble autoporté permettant l’acheminement des régimes de banes depuis les parcelles où elles sont récoltées jusqu’au stations de conditionnement installées au milieu de l’exploitation. Ainsi la perte de production s’est trouvée significativement limitée par la réduction de la manutention, et la productivité a augmenté d’autant. Aujourd’hui Oikocredit finance l’achat d’intrants pour l’exploitation et le conditionnement, à travers une ligne de crédit renouvelable de 150K€. Vendue à un meilleur prix, la banane d’APPBOSA est donc également mieux produite et conditionnée, grâce à un financement évolutif adapté aux besoins des paysans.

Marc-Henri Stroh, Président de l’Association de soutien Oikocredit Ile de France & Ouest parle, lorsqu’il évoque cette complémentarité entre commerce équitable et finance solidaire, de « manger la banane par les deux bouts ». Le spot télévisé qui portait ce slogan n’est plus diffusé depuis longtemps, mais l’image a gardé toute sa pertinence, et elle illustre bien notre propos.

 

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